Le corps dur, comme découpé dans le roc, Virgilio Sieni est un danseur impressionnant, dont le travail est centré sur l'exploration d'une grammaire propre aux gestes, aux attitudes, aux aléas maîtrisés de la carapace humaine. C'est un florentin, formé à la danse moderne et classique parallèlement à des études d'art et architecture. En 1983, Virgilio Sieni fonde sa compagnie et crée de courtes pièces originales avec un groupe de quelques danseurs. La danse est chez lui ancrée dans le concret de la vie et la recherche des liens les plus simples et directs entre les corps le pousse à chasser hors du plateau les envols spectaculaires, le répertoire académique et les incarnations trop sentimentales. Les corps qu'il installe et fait bouger semblent tous liés à une recherche visuelle, à une ambiance sonore et une matière humaine, aussi étranges que denses et rigoureuses. Les spectacles de sa compagnie sont régulièrement montrés en Italie et en Europe. Virgilio Sieni dirige l'espace Cango qu'il a fondé en 2003 à Florence, un centre, d'une conception innovante, dédié à l'expérimentation sur la danse et les disciplines du corps ainsi qu'au langage artistique contemporain. Cango constitue un chantier de référence international ouvert aux rencontres sur le territoire et à l'accueil d'artistes internationaux. En 2007, il a fondé l'Académie sur l'art du geste, un projet centré sur la transmission, l'enseignement et la création. Le cœur de l'Académie est à Florence mais elle rayonne sur un territoire bien plus large par l'intermédiaire d'artistes et d'enseignants formés par Virgilio Sieni. Quand on les voit côte à côte, Virgilio et Fosco Sieni, fils et père, ont le même visage grave, un même air décidé, un regard profond, et partagent une authenticité populaire et mélancolique. Le plus vieux, et plus petit, est simplement “encore moins danseur” que le plus jeune. Sans cesse, ils vont se chercher, se tenir, parfois se repousser. Ils “dansent” ensemble, le corps oblique, en équilibre instable, parfois en se donnant la main, en partageant un jeu, un verre, une table, un exercice du corps, c'est-à-dire aux antipodes de la chorégraphie et des duos de prestige. D'ailleurs, où sont-ils perdus, ces deux rejetons d'une famille commune ? Les voici comme enfermés dans des lieux froids, désolés, tristes, qu'ils habitent le geste rare et les élans contenus. D'un coup, la complicité filiale s'impose, par des tours de passe-passe, un jeu de ballon ou de cerceau, partagé, tendre comme le soleil pâle qui perce à travers les fenêtres. Mais souvent, chacun est renvoyé à sa solitude d'être condamné à la mélancolie, étrange ballet de gestes saccadés et répétitifs pour l'ancien, de contorsions sans but pour le plus jeune, comme si ces deux hommes n'avaient pour existence que le traumatisme parallèle de l'incommunicabilité. Pourtant, cette manière de ne pas se parler est aussi une plongée vers les origines, le fils trouvant chez le père le début de ses propres gestes. C'est la condition de l'homme qu'explore ainsi Virgilio Sieni dans ce spectacle, qui fait parfois penser au film documentaire San Clemente de Raymond Depardon, l'existence de cet homme moderne qui part à la conquête de lui-même et de son identité physique. Les seules échappées n'en sont pas moins radicales, flottant dans un halo de lumière blanche, rouge, bleue, accompagnées d'une ambiance sonore oppressante, comme si le père et le fils avaient été oubliés là pour mieux se retrouver et se comprendre. ADB
Distribution
de Virgilio Sieni avec: Virgilio et Fosco Sieni projet sonore et live electronics: Francesco Giomi, Francesco Canavese (Tempo Reale) lumières: Virgilio Sieni production: Daniela Giuliano
Production
production: Compagnia Virgilio Sieni, Tempo Reale en collaboration: avec le 35e Festival de Santarcangelo (Italie) avec le soutien: du ministère italien de la Culture, du Conseil régional de Toscane, de la Ville de Sienne et de la Ville de Florence