Licencié en Arts plastiques, Arthur Nauzyciel est l'élève d'Antoine Vitez à l'École du Théâtre national de Chaillot de 1986 à 1989, tout en faisant des études cinématographiques. Comédien avec Éric Vigner, Alain Françon, Jacques Nichet, Philippe Clévenot et Tsai Ming Liang, puis metteur en scène, il est artiste associé au Centre dramatique national de Bretagne, CDDB-Théâtre de Lorient depuis 1996 et fonde sa compagnie à Lorient en 1999. Le Malade imaginaire ou le silence de Molière, sa première mise en scène, est repris depuis régulièrement en tournée jusqu'à aujourd'hui. En 2001, il crée à Atlanta Black Battles with Dogs, présenté en France en 2002, puis à Chicago en 2004. Il met en scène en 2003 Oh les beaux jours de Beckett avec Marilú Marini à Lorient, Buenos Aires, puis à Paris au Théâtre de l'Odéon. En 2004, il fait entrer Thomas Bernhard au répertoire de la Comédie-Française en mettant en scène salle Richelieu Place des héros. La même année, il crée à Atlanta l'ultime pièce de Koltès, Roberto Zucco.
Le théâtre d'Arthur Nauzyciel témoigne de sa volonté de faire entendre les textes au plus près de leur sens, dans un travail toujours proche de l'intimité de l'acteur.
Sur un chantier de construction, dans une Afrique moderne loin des clichés, Bernard-Marie Koltès met face à face deux mondes à travers la rencontre entre un homme noir, qui vient chercher le corps de son frère disparu, et des hommes blancs qui vivent reclus dans leur quartier réservé. Cette confrontation ne laissera aucun des protagonistes indemnes et bouleversera profondément ces existences, en détruisant le temps d'une nuit de paroles et de silences les cadres traditionnels des rapports noirs-blancs ou hommes-femmes. Arthur Nauzyciel a créé ce spectacle à Atlanta, la capitale du sud des États-Unis, pays qui a toujours fasciné Koltès, sur cette terre historique de l'esclavagisme et de la ségrégation raciale. Les mots de l'auteur, dans une nouvelle traduction en américain, y firent l'effet d'une bombe, mettant les spectateurs dans une situation d'inconfort hors du politiquement correct en vigueur. Le travail des acteurs américains permet de faire entendre cette partition précise et minutieuse de la langue koltésienne, et ainsi d'ouvrir les sens et les significations de l'œuvre. Se crée alors un univers où combats de race, de sexe et de classe se mêlent inextricablement, où chaque protagoniste se trouve au bord d'un précipice vertigineux.
Arthur Nauzyciel rend palpable cette histoire d'amour et de deuil, la tragédie et la violence des êtres et des lieux, montrant les corps se frôler et s'éloigner dans une chorégraphie implacable, donnant à voir, presque cinématographiquement, l'univers de la nuit africaine à travers ses bruits et sa chaleur étouffante. Rattrapés par l'actualité, résonneront peut-être plus fort encore aujourd'hui ces mots d'Alboury, le Noir, à Horn, le Blanc : « Il n'y a pas assez de place dans vos têtes et dans toutes vos poches pour y ranger tous vos mensonges ».
Jean-François Perrier
Distribution
mise en scène et adaptation : Arthur Nauzyciel
traduction : David Bradby, Maria Delgado
avec : Janice Akers, Isma'il Ibn Conner, Tim McDonough, Daniel Pettrow
scénographie : Giulio Lichtner, Arthur Nauzyciel
lumières : Christophe Delarue, Giulio Lichtner
son : Xavier Jacquot
voix off : Marcel Bozonnet
costumes : Arthur Nauzyciel
Production
Production : Compagnie 41751/Arthur Nauzyciel, CDDB - Théâtre de Lorient, 7Stages (Atlanta), Étant Donnés / The French-American Fund for the Performing Arts, avec le soutien de l'AFAA