Volontairement dépouillé de ses prérogatives royales, le vieux Lear revient hanter Avignon. Aujourd'hui, avec Lear is in town, il réapparaît dans une version resserrée que proposent Ludovic Lagarde et ses compagnons, les écrivains-traducteurs Frédéric Boyer et Olivier Cadiot. Une pièce qui verra cette figure mythique du théâtre parcourir la lande désertique de la Carrière de Boulbon, accompagnée seulement de son fou et de sa fille Cordélia. Une relecture à trois voix de l'histoire de ce roi qui ne cesse de se questionner sur sa vie, jusqu'à la folie. Si le trio Lagarde-Boyer-Cadiot s'aventure dans cette pièce de Shakespeare, c'est pour saisir les traumatismes de cet homme, liés à la vieillesse, à la filiation, à la guerre et à l'usure du pouvoir. Comme dans La Dernière Bande de Beckett, le Lear qu'ils imaginent réécoute les scènes clés de son passé pour tenter de comprendre ce qui s'y est joué. Maladroit et impuissant, il invoque les démons pour conjurer le sort funeste qui lui a été réservé, attaché qu'il est à ce vieux monde imprégné de magie et de procédés occultes dont il est issu. Mélange de cruauté et de tendresse, de lyrisme et de pathétique, d'horreur et de visions fulgurantes, la pièce ne cesse de déplacer les regards que l'on peut porter sur elle. En axant leur travail autour d'un paganisme qui fait sans cesse appel aux forces du mal qu'il faut combattre par des exorcismes, les traducteurs sont restés entièrement fidèles à un texte qui décline tous les noms de démons, petits et grands, toutes les formules magiques venues du fond des temps. Ce ne sera donc pas Lear qui sera présenté dans la Carrière de Boulbon, mais un regard porté sur Lear, une auscultation de ce personnage à travers une compression respectueuse du texte, opérée par coupes et non par réécriture. Une pièce qui extrait la substantifique moelle de cette tragédie shakespearienne qui dépasse tout cadre historique, tout cadre psychologique, pour toucher au coeur des énigmes que l'humanité tente de résoudre depuis la nuit des temps. JFP
C'est à la date du 26 novembre 1606 que fut jouée pour la première fois à Londres, plus précisément à Whitehall devant le roi Jacques Ier, cette Chronique véridique de la vie et de la mort du Roi Lear et de ses trois filles. Une fois encore Shakespeare (1564-1616) n'a inventé ni le nom ni l'histoire de son héros puisque, dès 1587, la figure de Lear est présente dans les Chroniques de Raphael Holinshed et dans divers autres récits versifiés. Tous ont été inspirés par la vie de ce roi qui aurait vécu en Angleterre 800 ans avant J.-C. selon l'Historia regum britanniae, publiée par l'évêque historien Geoffroy de Monmouth.
Distribution
mise en scène Ludovic Lagarde
scénographie Antoine Vasseur
lumière Sébastien Michaud
costumes Fanny Brouste
dramaturgie Marion Stoufflet
son Nicolas Becker
assistanat à la mise en scène Céline Gaudier
collaboration artistique David Bichindaritz
avec Clotilde Hesme, Johan Leysen, Laurent Poitrenaux
Production
production La Comédie de Reims CDN
coproduction Festival d'Avignon, Centre dramatique national Orléans/Loiret/Centre, Équinoxe Scène nationale de Châteauroux
avec le soutien du CENTQUATRE-Paris
Par son soutien, l'Adami aide le Festival d'Avignon à s'engager sur des coproductions.