Quel féminisme aujourd'hui ?

Quel féminisme aujourd'hui ?

Si l'égalité entre les hommes et les femmes reste un combat largement partagé, les modalités pour y parvenir font débat. Faut-il, par exemple, généraliser les quotas et la parité ? Le féminisme des années 2010 refuse les assignations à identité, récuse l'essentialisme et introduit le trouble dans le genre. Il cherche également à émanciper les hommes et à faire jouer aux garçons d'autres partitions que celles que leur imposent les conventions. «On ne naît pas femme, on le devient » : dans le sillage de la fameuse phrase de Simone de Beauvoir, le constructivisme est aujourd'hui de mise. La femme est une construction sociale et l'éternel féminin, fait de douceur intrinsèque ou de fibre maternelle naturelle, est une fiction conceptuelle. Mais si le féminisme vise à libérer les femmes de ces assignations identitaires, il lui incombe de « libérer les hommes d'un modèle viril et patriarcal tout aussi sclérosant », soutient l'écrivaine Joy Sorman. Loin d'être anecdotique par rapport aux combats pour la parité politique ou l'égalité économique, la « libération des dominants » lui apparaît comme un levier de l'émancipation des dominées. Et si l'homme était l'avenir de la femme ? Car un homme libéré de ses réflexes sexués sera moins enclin à retomber dans les carcans d'antan. Ce sont également les conditions matérielles d'existence qui déterminent la conscience. En sociologue, Dominique Méda a analysé le poids des choix politiques dans l'accentuation des inégalités entre les femmes et les hommes. Par exemple, la proportion de femmes salariées à temps partiel a plus que doublé depuis le début des années 1990. Face aux salaires comme aux retraites, les femmes restent perdantes, notamment parce que l'allocation parentale d'éducation les maintient hors de l'emploi et freine leur progression professionnelle. Une rencontre pour penser un nouvel âge de l'émancipation.

photo © Clémence Hérout

Avec Dominique Méda sociologue
Joy Sorman écrivain