Résistant polonais, catholique, Jan Karski est le témoin d'une grande tragédie de l'Histoire : l'extermination de la population juive du ghetto de Varsovie. Une tragédie dont il devient le messager auprès de ceux qui ont le pouvoir d\'agir et d'y mettre fin. Mais son appel restera sans suite, malgré son entrevue avec Roosevelt. Héros oublié ou presque, en dépit du livre qu'il a publié en 1944, Mon témoignage devant le monde, il se retrouve en pleine lumière lorsque le cinéaste Claude Lanzmann le fait parler, en 1985 dans son film essentiel Shoah, de cet incroyable périple qui l'a mené jusque dans le bureau du président des États-Unis. Troublé par l'histoire de cet homme confronté en 1943 à l'attitude passive des démocraties alliées face au génocide organisé par les nazis, Yannick Haenel écrit en 2009 un roman. Une fiction construite en trois temps : celui de la parole filmée qu'il retranscrit, celui de l'autobiographie de Karski et enfin, celui de l'imaginaire du romancier qui fait parler le héros au présent. À son tour troublé par ce livre à la construction originale, Arthur Nauzyciel a voulu le faire résonner sur un plateau, persuadé que « s'il n'y a pas de limites à la littérature », il ne peut y en avoir au théâtre. Comme à son origine, le théâtre peut faire entendre la voix de ceux qui n'en ont plus et transmettre au plus grand nombre cette tragédie du silence imposé. Au moment où les témoins directs de l'Holocauste commencent à disparaître, le temps du passage de relais est venu, pour que rien ne s'oublie. L'heure des témoins de témoins, qui portent un regard nouveau et posent de nouvelles questions, parfois dérangeantes mais toujours nécessaires. La fiction théâtrale s'aventure pleinement dans ces territoires de terreur où, sans trahir la vérité des faits, elle peut apporter un éclairage sur le réel prenant en compte la part irréductible de l'humain et échapper ainsi à un didactisme réducteur. Entouré d'un plasticien polonais, d'un scénographe latino-américain, d\'un éclairagiste américain, d'un musicien autrichien et du comédien Laurent Poitrenaux, Arthur Nauzyciel poursuit son désir d\'un théâtre hors des frontières, qui s'interroge sur lui-même tout en questionnant la mémoire du monde.
Yannick Haenel a vingt-neuf ans lorsqu'il publie en 1996 son premier livre, Les Petits soldats. En 2005, après la parution de plusieurs romans Introduction à la mort française, Évoluer parmi les avalanches et À mon seul désir, qui lui valent une reconnaissance du public et du milieu littéraire, il abandonne son travail d'enseignant auquel l'avait conduit son agrégation de lettres. Lauréat du prix Décembre pour Cercle, publié en 2007, c'est en 2009 qu'il écrit Jan Karski, couronné par le prix Interallié. Un livre qui, en mêlant documents et oeuvre romanesque autour de la vie de Jan Karski, entraîna un débat sur les rapports entre l'Histoire et la fiction, toujours sensibles, particulièrement quand il s'agit de la Shoah. Yannick Haenel vient de publier un nouveau roman : Le Sens du calme.
JFP
Distribution
mise en scène et adaptation Arthur Nauzyciel
scénographie Riccardo Hernandez
regard et chorégraphie Damien Jalet
musique Christian Fennesz
lumière Scott Zielinski
son Xavier Jacquot
costumes José Lévy
vidéo Miroslaw Balka
avec Alexandra Gilbert, Arthur Nauzyciel, Laurent Poitrenaux
et la voix de Marthe Keller
Production
production Centre dramatique national Orléans/Loiret/Centre
coproduction Festival d'Avignon, Les Gémeaux Scène nationale de Sceaux, CDDB-Théâtre de Lorient Centre dramatique national, Maison de la Culture de Bourges Scène nationale, La Comédie de Reims Centre dramatique national, Festival Scènes d'Europe
avec le soutien de la Région Centre, de l'Institut Polonais de Paris et de la Fondation d'entreprise Hermès dans le cadre de son programme New settings
avec la participation de l'Institut Français
avec l'aide du Théâtre TR Warszawa (Varsovie) et le soutien de l'Ambassade de France en Pologne
Par son soutien, l'Adami aide le Festival d'Avignon à s'engager sur des coproductions.