Il existe à Vienne un hôpital, l'hôpital Otto Wagner, d'une belle architecture de marbre et d'or, dont une partie a été transformée en théâtre. En le découvrant en 2005, au moment où il cherchait un lieu pour créer un nouveau spectacle, Christoph Marthaler s'intéressa à son histoire et découvrit la face cachée et peu reluisante de ce bâtiment qui fut, entre 1940 et 1945, et peut-être un peu après, un centre d'expérimentation et d'extermination d'enfants et d'adultes atteints de maladies psychiques. Toujours inspiré par les lieux et l'ambiance des villes dans lesquelles il travaille avec ses collaborateurs artistiques, Christoph Marthaler a voulu, avec Schutz vor der Zukunft, attirer l'attention, non seulement sur les pratiques d'euthanasie en vigueur durant la période nazie, mais sur toutes les tentatives de sélection qui ont tenté de créer un monde débarrassé de ses « tares », de ses « anormaux ». Pour tirer ce signal d'alarme à leur inimitable manière, le metteur en scène et sa dramaturge Stefanie Carp ont composé une partition textuelle faite d'écrits politiques, d'essais théoriques, de biographies de patients d'hier et d'aujourd'hui, ainsi qu'une partition musicale associant Schubert, Mahler, Schumann et Chostakovitch, ce musicien qui passa la plus grande partie de sa vie à composer sous la menace d'une déportation au goulag. Mémoire du passé et vision de l'avenir s'entrechoquent, se mêlent au rythme des prises de parole, des performances vocales des acteurs-chanteurs, des chorégraphies esquissées par les silhouettes toujours si bien dessinées des personnages marthalériens, des êtres décalés, démunis et souvent maladroits en qui nous nous reconnaissons. L'univers qu'ils créent, fait de ralentissements et d'accélérations, nous permet de prendre le temps d'ouvrir les yeux et les oreilles sur les menaces diffuses qui les entourent, qui nous entourent, pour tenter, si faire se peut, de « se protéger de l'avenir ». JFP
Distribution
mise en scène Christoph Marthaler
collaboration à la mise en scène Michel Schröder
conception Stefanie Carp, Markus Hinterhäuser
direction musicale Rosemary Hardy
scénographie et installations Duri Bischoff
costumes Sarah Schittek
textes Stefanie Carp
avec Rosemary Hardy, Markus Hinterhäuser, Ueli Jäggi, Jürg Kienberger, Katja Kolm, Bernhard Landau, Josef Ostendorf, Nicolas Rosat, Clemens Sienknecht, Bettina Stucky, Jeroen Willems
Production
production Wiener Festwochen (Vienne)
coproduction spielzeiteuropa / Berliner Festspiele, Festival international de Théâtre Tchekhov de Moscou, Goethe Institut
avec le soutien de Pro Helvetia-Fondation suisse pour la Culture et de l'Ambassade du Royaume des Pays-Bas à Paris