À 32 ans, Sidi Larbi Cherkaoui, artiste associé au Toneelhuis d'Anvers, s'est déjà imposé comme l'un des danseurs virtuoses de sa génération, et l'un des chorégraphes les plus inventifs, convoquant dans ses spectacles des styles et des techniques très divers, des musiques éclectiques et surprenantes. Il a dansé aux Ballets C. de la B. dans Iets op Bach d'Alain Platel en 1998 et s'est rapidement fait connaître comme chorégraphe, avec Rien de rien en 2000, pièce pour six danseurs influencée par la mélancolie des chansons populaires. En 2002, à Avignon, son travail d'interprète dans le solo IT de Wim Vandekeybus est salué comme l'événement du Vif du Sujet. La même année, avec Damien Jalet et deux danseurs de Sasha Waltz, il crée D'avant, spectacle inspiré par des chansons du XIIIe siècle qui n'hésite pas à creuser la violence des corps et le fanatisme des esprits, tout en ménageant des respirations douces et des suspensions poétiques. Foi (2003), Tempus fugit (2004), In Memoriam (2005), Mea Culpa (2006), Myth (2007) ou Origine (2008) ont depuis confirmé son inspiration, mêlant des sources médiévales, érudites, sophistiquées, et des interprétations généreuses, bariolées, subtiles ou spectaculaires. À cheval sur les cultures, naturellement à son aise dans le métissage et la rencontre, son travail avec le danseur et chorégraphe anglais d'origine bengali, Akram Khan, Zero Degrees (2005), a fini d'imposer Sidi Larbi Cherkaoui sur la scène européenne. Baroque dans l'âme, curieux, exigeant, il ne renoncera pas à la danse comme une aventure. Au Festival d'Avignon, Sidi Larbi Cherkaoui a déjà présenté IT (en collaboration avec Wim Vandekeybus) dans le cadre du Vif du sujet en 2002 et Tempus fugit en 2004 ; il devait y présenter Foi en 2003.
Sutra est une forme de journal de voyage, qui a mené Sidi Larbi Cherkaoui vers l'une des sources de son inspiration, le temple Shaolin en Chine, berceau du kung-fu, lieu mythique où l'on croise le fantôme de Bruce Lee et l'une des pensées du corps les plus élaborées au monde, la spiritualité monacale et la pratique des arts martiaux. Travaillant sur place au monastère de Henan, Sidi Larbi Cherkaoui a recherché une double initiation : il reçoit gestes, rituels, rythmes et intuitions des moines du temple Shaolin, tout en leur proposant un cadre chorégraphique contemporain, fait d'autres dispositions des corps, d'autres vitesses, d'autres musicalités. Cet échange, replacé sur le plateau d'un spectacle, ressemble à l'apprentissage d'une nouvelle langue, écrite entre Orient et Occident, qui respecte la tradition du kung-fu et lui apporte un point de vue original. Comme s'il s'agissait de se replacer aux origines d'un art qui est aussi un mode de vie. C'est le corps et son énergie, maîtrisée, libérée, vitale, animale, qui animent la scène de Sutra, où dix-sept moines Shaolin entourent Sidi Larbi Cherkaoui dans une chorégraphie qui fuit la reconstitution folklorique pour mieux réinventer une philosophie de la vie à travers ses vitesses et ses pauses, ses éclats et ses retraits, sa vivacité apparente et son relâchement intérieur, son inspiration animalière et ses élans spirituels. L'artiste anglais Antony Gormley compose la part visuelle et scénographique de cet univers, tandis que le musicien polonais Szymon Brzóska travaille à sa révélation la plus intime, entre rythme impulsif et sagesse mélancolique. Dans cette étrange zone, où les corps font feu de tout bois tout en préservant les pouvoirs apaisants de la méditation, s'écrit une grammaire physique faite de tradition et de modernité, de matière et d'imaginaire, qui cherche à construire un passage entre une civilisation et les regards qui la découvrent : cette traversée initia-tique qui mène à la beauté du geste. ADB
Distribution
mise en scène et chorégraphie: Sidi Larbi Cherkaoui
création visuelle et décor: Antony Gormley
musique: Szymon Brzóska
avec: Shiyan Bo, Shiyan Chuang, Shiyan Ci, Shiyan Da, Shiyan
Dong, Shiyan Hao, Shiyan Jiao, Shiyan Jie, Shiyan Li, Shiyan Mo, Shiyan Nan, Shiyan Peng, Shiyan Qun, Shiyan Tao, Shiyan Ting, Shiyan Yong, Shiyan Yuan, Shiyan Xing, Shiyan Zhu
piano: Szymon Brzóska
violon: Alies Sluiter, Olga Wojciechowska
violoncelle: Laura Anstee
percussions: Coordt Linke
production déléguée: Sadler's Wells
Production
production: Sadler's Wells (Londres), en coproduction avec le Festival d'Athènes, le Festival GREC (Barcelone), le Grand Théâtre de Luxembourg, La Monnaie (Bruxelles), le Festival d'Avignon, la Fondazione Musica per Roma et la Shaolin
Cultural Communications Company
avec le soutien: des autorités flamandes et de la Ville d'Anvers