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avec
Jacques Le Goff historien (intervention diffusée en vidéo)
Jacqueline Risset écrivain et traductrice
Voyage initiatique et métaphysique, expérience poétique et politique, le chef-d'œuvre de Dante est contemporain de la naissance du purgatoire, ce troisième lieu de l'au-delà, situé entre l'enfer et le paradis, inventé par une société qui aspire à plus de justice et de reconnaissance de l'individu. En quoi La Divine Comédie est-elle une des matrices de notre modernité ? Pourquoi une représentation médiévale de l'au-delà, en forme d'enfer, de purgatoire et de paradis, nous intéresse-t-elle si fort, alors que les réalités qu'elle évoque nous sont devenues tout à fait étrangères ? “Sans doute parce que le “médiéval” en jeu dans l'œuvre de Dante n'est pas expression d'une idéologie religieuse fermée, hiérarchisée, obscurantiste, mais l'expression d'une pensée vivante où la philosophie et la théologie du Moyen Age explorent et transgressent leurs limites, explique Jacqueline Risset. Et aussi parce que le visiteur de ces royaumes des morts ne se met pas en position de juge – comme distributeur de peines et récompenses au nom d'une loi du Père totalement intériorisée. De fait la Comédie (c'est le titre qu'il donnait à son œuvre, pour marquer qu'elle avait une fin heureuse) est un poème initiatique où le voyage transforme le voyageur. La complexité fascinante d'une telle œuvre tient à la surprise continuelle que nous éprouvons comme lecteurs non seulement en face des spectacles inouïs qui se déroulent devant nous et devant les yeux de Dante et de son guide Virgile (géographie à la Jules Verne, paysages inconnus, monstres et présences angéliques, terreur, musique et lumière) mais aussi devant les changements du regard lui-même”.