La compagnie Joji Inc a été créée par Johanne Saunier et Jim Clayburgh en 1998. Elle – “Jo” – vient de la compagnie Rosas d'Anne Teresa De Keersmaeker, dont elle a été l'une des principales danseuses pendant dix ans, notamment dans Mikrokosmos, Stella ou ERTS. Elle a également travaillé avec Michèle Anne de Mey, Fatou Traoré, Thierry de Mey, et enseigne à l'école PARTS. Johanne Saunier est l'interprète par excellence. Lui – “Ji” – fut l'un des fondateurs, il y a trente ans, du Wooster Group à New York, dont il a été décorateur, concepteur de lumières, et scénographe attitré. Jim Clayburgh a aussi réalisé les décors de plusieurs spectacles des Mabou Mines, de Richard Foreman ou de la compagnie Isabella Soupart. À eux deux, la brune qui n'a peur de rien et le grand new-yorkais élégant, ils forment de façon complémentaire le couple chorégraphie / scénographie . Depuis 1998, ils ont créé ensemble une dizaine de spectacles, le solo Sans la voix des maîtres, la pièce pour trois danseuses Final Scene, une autre pour quatre danseuses, Landscape with 4 figures, ou encore It's like…, SWOT, Urban bubbles. Lancé en 2004, le projet Erase-E(X) se déploie progressivement en six parties chorégraphiées, dansées par Johanne Saunier et d'autres interprètes. Ce spectacle accomplit l'équilibre, toujours instable, qui illustre la définition de l'art selon Joji Inc : une danse qui serait tout autant physique que posée, aussi débordante d'énergie que techniquement impa-rable, sans cesse relancée par l'inventivité des gestes de l'interprète et des pratiques du plateau.
Au Festival d'Avignon Johanne Saunier et Jim Clayburgh ont déjà présenté les parties 1, 2 et 3 d'Erase-E(X) dans le cadre du Sujet à Vif en 2004 et 2005.
En 1953, Robert Rauschenberg efface un tableau de Willem De Kooning pour se le réapproprier. C'est sur le modèle radical de cet acte d'art moderne, Erased De Kooning Drawing, que Johanne Saunier et Jim Clayburgh ont imaginé leur propre spec-tacle, Erase-E(X), interprété par Johanne Saunier : une danse palimpseste, un relais où plusieurs chorégraphes vont effacer et re-créer la pièce d'un autre. La première esquisse est offerte par la chorégraphe belge Anne Teresa De Keersmaeker, danse réinterprétée, sur le mode de la mécanique qui fonctionne, s'emballe puis s'enraye, par le Wooster Group comme une variation autour du personnage de Bardot dans Le Mépris de Jean-Luc Godard. Anne Teresa De Keersmaeker reforge ensuite la pièce comme un rite pur, abstrait, sur percussions indiennes, avant que l'actrice-danseuse, metteuse en scène et chorégraphe bruxelloise Isabella Soupart ne fasse resurgir Bardot, mais affublée d'un étrange garde du corps cybernétique, paranoïaque et gaffeur. Dans les deux parties suivantes, le vidéaste Kurt D'Haeseleer puis le compositeur Georges Aperghis s'emparent à leur tour de ce jeu de mise en scène et en sons par créations / effacements. Et c'est enfin Johanne Saunier elle-même qui clôt le cycle sur une note très sensuelle en s'entourant de deux danseuses. Devant ces six pièces données dans leur continuité, on ressent plus encore le travail physique d'une danse qui fait gripper la machine, contamine et piège le mythe de la femme fatale, perturbe la communication entre les êtres et entre les médias, attaque le glamour cinématographique pour le projeter et l'éparpiller sur le plateau des gestes et des humeurs. Le Mépris se rejoue là en version panique, la diva se fait papillon de nuit qui se cogne à la lumière des projecteurs, et la sensualité alanguie de la star passe peu à peu au crible d'une ironie mordante mais absolument réjouissante. La danseuse Johanne Saunier passe d'un univers à l'autre avec une aisance étonnante, imprimant sa part d'artiste-interprète dans chacune des écritures du spectacle. ADB
Distribution
concept: Joji Inc
Johanne Saunier / Jim Clayburgh
chorégraphie: The Wooster Group (1), Anne Teresa De Keersmaeker (2), Isabella Soupart (3), Johanne Saunier (6)
vidéoperformance: Kurt d'Haeseleer (4)
texte musical: Georges Aperghis (5)
scénographie et lumières: Jim Clayburgh
interprétation: Johanne Saunier, Charles François (3), Anna Massoni (5,6), Julie Verbinnen (5,6)
ingénieur du son: Philippe Arnaud
régie vidéo: Benjamin Lasserre (4)
assistantes chorégraphe: Julie Verbinnen (1,2), Anna Massoni (4), Shila Anaraki (5,6)
électronique: Alex Fostier (5)
costumes: The Wooster Group (1), Anke Loh, Perrine Mees (2), Isabella Soupart (3), Joji Inc (4,6), Benoît Coutiez (5)
administration et diffusion: Gaëtane Bibot
Production
production: Joji Inc
Erase-E(X) a été créé dans le cadre du Sujet à Vif,
coproduction: Sacd/Festival d'Avignon, avec le soutien de la Communauté flamande (parties 1, 2, 3)
avec l'aide: du ministère belge de la Communauté française service de la danse Coproduction Théâtre de la Ville-Paris (partie 4), Charleroi /Danses (partie 4,5,6)
avec le soutien: du Conseil général du Val d'Oise, de l'ADIAM Val d'Oise, de la DRAC Île-de-France, dans le cadre du soutien à la création du réseau Escales danse en Val d'Oise (partie 4)
avec l'aide du Commissariat général aux Relations internationales de la Communauté française de Belgique