Jan Fabre est “artiste en résidence” au DeSingel (Anvers) Un monde entièrement livré au pouvoir de l'imagination théâtrale, c'est ce que prône Jan Fabre dès C'est du théâtre comme il était à espérer et à prévoir (1982) et Le Pouvoir des folies théâtrales (1984), ses premières pièces remarquées qui décapent les conventions de la scène. Un théâtre de la rébellion (As long as the world needs a warrior's soul, 2000), influencé par sa formation de plasticien et sa pratique de la performance, qui met en scène aussi bien le temps de la matière, celle du peintre, que celui de l'être humain ou de l'animal (Parrots and Guinea Pigs, 2002). Mais tout se crée à partir du corps et de son langage. Corps physique dans Sweet Temptations (1991), spirituel dans Universal Copyrights 1&9 (1995) et érotique dans Glowing Icons (1997). Proche de l'animal, avec sa mémoire et ses instincts fondamentaux, ce corps est doté d'un pouvoir presque magique, celui de la métamorphose. C'est pour cela qu'il aime à désigner ses acteurs comme des “guerriers de la beauté”, entraînés à la démesure des images et du rêve. Cependant, au-delà de l'excès, et souvent avec humour ou ironie, Jan Fabre manifeste une profonde tendresse envers l'humain et ses faiblesses. Depuis ces nombreuses années entièrement dédiées à son art, avec une œuvre protéiforme qui comprend sculptures et installations, textes et mises en scène – plus d'une trentaine à ce jour –, Jan Fabre, de l'atelier à l'œuvre plastique, du studio à la scène, poursuit la quête fiévreuse de ses visions. Chez lui, l'homme se manifeste à travers ses pulsions, là où réside sa beauté, celle du corps, sa jouissance, de l'extase à l'agonie, de la soumission à la révolte. Des monologues (Elle était et elle est, même, Étant donnés) ou solos intimes composés sur mesure pour ses interprètes (Quando l'uomo principale è una donna, L'Ange de la mort) à ses flamboyantes pièces de groupe, la démarche de cet “Homme qui mesure les nuages” garde le goût de l'enfance et de ses jeux. Se fiant à l'intuition, Jan Fabre travaille sans cesse la plasticité de l'homme, cherchant à la couler dans une forme poétique pour donner jour à de nouveaux horizons. Au Festival d'Avignon, Jan Fabre a déjà présenté Das glas im kopf wird vom glas en 1988, My movement are alone like street-dogs en 2000, Je suis sang dans la Cour d'honneur du Palais des papes et l'installation plastique Umbraculum en 2001, et L'Ange de la mort en 2004.
En 2001, Jan Fabre marque la 55e édition du Festival d'Avignon en créant spécialement pour la Cour d'honneur Je suis sang. Cette année, il recrée une nouvelle version, en diptyque avec l'Histoire des larmes, de ce “conte de fées médiéval”. Du mariage à l'enfantement, de la guerre à l'amour, de la violence à l'harmonie, le sang, ce liquide fait corps, transcende notre humanité et célèbre la beauté de l'Homme. Une vingtaine d'interprètes – comédiens, danseurs, musiciens – nous entraînent dans un voyage vers notre propre intimité. Utilisant l'espace à l'instar du peintre Jérôme Bosch, Jan Fabre crée un tableau fracassant de fantastique et de beauté sur le plateau de la Cour d'honneur du Palais des papes, inspiré par l'architecture et la mémoire du lieu. Exploration de la voie du sang en tant que matériau premier, cette métaphore, vigoureuse mise à nu de la représentation du corps, est aussi un essai sur la métamorphose. Une tentative de créer un corps liquide, unique, où se mêleraient la connaissance des hommes et l'instinct animal, au-delà des espèces et des races, un corps qui pourrait sentir et penser autrement et, pourquoi pas, faire surgir un autre monde. Un spectacle intense, un spectacle hanté par le rouge. “Je me libère de moi-même”, dit une voix dans les derniers moments de la pièce. L'homme a-t-il dépassé le bien et le mal ? Serait-il à présent invulnérable ? Cette fresque en français et en latin, qui semble reprendre l'esthétique du Moyen-Âge, la fait éclater en réalité dans un langage prophétique, une action rituelle et une chorégraphie électrique.
Distribution
Texte, scénographie, chorégraphie : Jan Fabre
Comédiens, danseurs, musiciens : Linda Adami, Tawny Andersen, Vicente Arlandis, Dimitri Brusselmans, Katrien Bruyneel, Annabelle Chambon, Cédric Charron, Sebastien Cneude, Anny Czupper, Barbara De Coninck, Els Deceukelier, Stijn Dickel, Olivier Dubois, Ivana Jozic, Marina Kaptijn, Guillaume Marie, Dirk Roofthooft, Maria Stamenkovic-Herranz, Geert Vaes, Helmut Van den Meersschaut (distribution en cours)
Traduction en français : Olivier Taymans
Traduction en latin : Luc De Coninck
Dramaturgie : Miet Martens
Assistance chorégraphie : Renée Copraij
Musique originale : Dag Taeldeman, Maarten Van Cauwenberghe, Danny Dupont, Sebastien Cneude
Lumières : Jan Dekeyser, Jan Fabre
Costumes : Daphne Kitschen, Jan Fabre
Production
Avec le soutien : de la Communauté flamande et du Ministre de la Culture Bert Anciaux
Recréation 2005 Production : Troubleyn / Jan Fabre (Anvers)
Coproduction 2001 : Festival d'Avignon, deSingel (Anvers), Sinequanon Dance Company (Athènes)
En collaboration avec : Muziektheater Transparant (Anvers)
Coproduction 2003 : Festival d'Avignon, deSingel (Anvers), Festival GREC (Barcelone), Melbourne Festival
Avec l'aide du : Programme culture 2000 de l'Union Européenne
Texte français publié par : L'Arche éditeur