Romancière et nouvelliste, traduite dans une quinzaine langues, Asli Erdogan incarne le rayonnement de la nouvelle littérature turque, celle de la génération d'après Orhan Pamuk. Elle a été emprisonnée pour des mots et des livres, convaincue que « la parole constitue une résistance et une résurrection ». Elle vit aujourd'hui en Allemagne en exil. Sur le plateau du musée Calvet nous avons souhaité rendre hommage à son écriture.
« N'oublions pas qu'Asli Erdogan est avant tout écrivaine. Ses textes possèdent une teneur politique évidente mais leur intensité poétique leur confère une dimension littéraire d'une rare ampleur. Une telle superposition des genres en fait l'originalité. Pourtant rien ne prédestinait à l'écriture cette scientifique qui a suivi une formation de physicienne. Pendant deux ans, elle a été intégrée aux équipes du Centre européen de recherches nucléaires (Cern) à Genève et c'est pendant ce séjour helvétique qu'elle a pris la décision de se consacrer uniquement à l'écriture. Période charnière évoquée dans un récit paru chez Actes Sud sous le titre Le Mandarin miraculeux. On peut rappeler qu'en dehors de ses quatre romans (L'Homme coquillage, La Ville dont la cape est rouge, Le Bâtiment de pierre et Dans le silence de la vie), elle donne de nombreux textes courts (deux recueils d'essais et de chroniques sur des sujets très variés sont encore inédits en français) où son humour dévastateur trouve à s'exprimer. Témoin engagé du tragique de l'existence, l'auteur ne perd jamais sa capacité de sourire.
Chaque année, France Culture et la SACD, en étroite collaboration, mettent en lumière l'oeuvre d'un·e auteur·rice. Lecture des Oiseaux de bois, traduction Jean Descat, publié aux éditions Actes Sud et d'extraits de Je t'interpelle dans la nuit, traduction Esin Soysal Dauvergne, publié aux éditions MEET, collection Les Bilingues.
Lecture des Oiseaux de bois, traduction Jean Descat, publié aux éditions Actes Sud et d'extraits de Je t'interpelle dans la nuit, traduction Esin Soysal Dauvergne, publié aux éditions MEET, collection Les Bilingues
Asli Erdogan Physicienne de formation, diplômée de l'Université anglophone du Bosphore (Istanbul), Asli Erdogan a travaillé au Cern de Genève. Elle a ensuite vécu deux ans à Rio de Janeiro puis rentre à Istanbul où elle collabore à la presse quotidienne et poursuit son oeuvre de romancière. À la suite de la tentative de putsch du 15 juillet 2016, elle est incarcérée d'août à décembre 2016 en raison de sa participation au journal Özgür Gündem soutenant notamment les revendications kurdes. Le parquet réclame alors la détention à perpétuité pour les chefs d'accusation suivants : « propagande en faveur d'une organisation terroriste », « appartenance à une organisation terroriste », « incitation au désordre ». Depuis sa sortie de prison, de nombreux prix lui ont été décernés, en Allemagne, Pays-Bas, Suède, Autriche et en Turquie même (le prix de l'Association des éditeurs de Turquie (« Prix de la liberté de pensée et d'expression » lui est remis le 23 mai 2017). Mais c'est sans doute l'attribution du Prix Simone de Beauvoir à Paris en janvier 2017 qui consacre avec éclat son statut d'icône de la résistance contre le pouvoir autoritaire qui applique sa loi de fer en Turquie. » Timour Muhidine
Sophie-Aude Picon Avant d'être réalisatrice pour la radio, Sophie-Aude Picon a été enseignante, metteuse en scène, comédienne et musicienne. Elle a étudié au Conservatoire national supérieur d'art dramatique de Paris et été lauréate de la Villa Médicis Hors les Murs. Depuis 2014 elle réalise des fictions radiophoniques pour France Culture et France Inter, travaillant plus particulièrement en son immersif pour ses dernières réalisations.
France Culture et la SACD ont noué un partenariat qui s'inscrit dans le temps, mais aussi dans un combat commun : celui de la liberté de création, celui des autrices et des auteurs. Dans une volonté de préserver une liberté de ton, de pensée, de créativité, de la transmettre, de la partager et de la défendre. L'invitation commune d'Asli Erdogan vise à faire entendre sa voix, son écriture poétique, engagée, forte et sensible. Il est capital d'honorer son talent, sa combativité, en ne fermant pas les frontières et sans museler la parole. « La liberté ne peut être réduite au silence » écrit-elle, et cela résume bien ce choix. Dans les jardins du musée Calvet, la fiction et la musique ne font pas chambre à part. Le Magnifique dit Gasby va résonner au son du rap de Sofiane Zermani. La SACD est heureuse de partager ces moments rares et nécessaires dans cet espace qui rend le passé si présent, l'écoute si particulière dans un esprit d'ouverture et d'invention. Catherine Tullat Administratrice radio SACD
Distribution
Avec Amira Casar Accompagnée au saxophone par Géraldine Laurent Textes choisis avec la complicité de Timour Muhidine, directeur de la collection Lettres turques