avec
Jacques Derrida, Gianni Vattimo, Heinz Wismann
Raillée par le secrétaire à la défense des États-Unis, Donald Rumsfeld, alors qu'une large partie du peuple et de ses dirigeants refusaient “le choc et l'effroi” de la guerre en Irak, héritière de l'idéal des Lumières, mais également issue des ruines du “siècle des extrêmes” qu'elle a elle-même enfanté, la “vieille Europe” apparaît à la fois comme une vieille dame engoncée à qui l'on demande des comptes sur son passé et comme une « mère courage » vers qui l'on se tourne pour se protéger d'une mondialisation de la précarité. À partir d'un dialogue entre trois intellectuels européens – Jacques Derrida, Gianni Vattimo, Heinz Wismann – il s'agira d'articuler la particularité de son histoire à la nécessité de fonder une nouvelle culture politique européenne, notamment par l'enchevêtrement des langues, la création de nouvelles instances démocratiques capables d'appliquer leurs résolutions ou par la persistance renouvelée des droits humains et sociaux. À l'heure où l'Europe a pris la voie d'une constitution élargie, au moment même où l'apathie politique, le retour d'un nationalisme étroit et la colonisation par l'imaginaire économique libéral s'étendent, alors que le modèle social européen menacé entre dans une phase de résistance active, il convient d'interroger cette citadelle assiégée, ce rempart d'égoïsme et de générosité mêlées, de particularisme et d'universalité imbriqués. Si l'histoire européenne nous a mis à l'abri de la tentation d'édicter le bonheur dans une seule contrée, les temps convulsés que nous traversons obligent à la nécessité de questionner, d'inventer, de proposer, afin que la “vieille Europe”, écartelée entre l'hégémonie américaine et la demande des pays “émergents”, puisse devenir la nôtre : une figure sur laquelle on s'adosse afin de construire un avenir qui ne soit pas prêt à consommer.