Après une formation de comédien au Centre théâtral du Maine où il rencontre Didier-Georges Gabily, puis à l'école du Théâtre national de Strasbourg, Jean-François Sivadier travaille avec Jacques Lassalle, Christian Rist, Alain Françon, Dominique Pitoiset, tout en devenant metteur en scène et auteur. Italienne avec orchestre qu'il écrit, met en scène et joue sera créée en 1996 et reprise en 2003. Entre-temps, il présente Le Mariage de Figaro de Beaumarchais puis La Vie de Galilée de Brecht avant de s'intéresser à l'opéra pour Madame Butterfly de Puccini. Très sensible à son compagnonnage avec Didier-Georges Gabily, Jean-François Sivadier ne conçoit le théâtre que comme une œuvre collective qu'il ne peut réaliser qu'avec un groupe d'acteurs et d'artistes unis pour défendre un projet, unis pour aller vers les spectateurs et quasiment les amener sur le plateau avec eux dans un moment de temps suspendu où tout est possible. Attentif avec méticulosité aux mots et au mouvement général des textes, il les met en valeur, les offre à un public hors toutes les conventions accumulées et souvent sclérosantes, proches sans être affadis. Faire du théâtre le lieu du plaisir où, ensemble, artistes et spectateurs découvrent au plus profond les œuvres dramatiques pour en être enrichis, voilà à quoi se consacre Jean-François Sivadier. Au Festival d'Avignon, Jean-François Sivadier a déjà présenté La Vie de Galilée de Brecht en 2002.
Bertolt Brecht n'a cessé entre 1938 et 1955 de reprendre et de retoucher sa pièce La Vie de Galilée, modifiant les significations de cette fable en même temps que se modifiait son rapport à la science (il y a un avant et un après Hiroshima) et son rapport au politique (il y a un avant et un après la R.D.A.). Jean-François Sivadier, en choisissant l'ultime version, a voulu aussi faire entendre un théâtre en train de se faire dans l'immédiat des mots. Le plateau est non seulement le lieu d'expérimentation scientifique de Galilée mais aussi celui de l'expérimentation théâtrale de Brecht, et la lunette astronomique qui atteint l'univers des planètes peut aussi servir à atteindre le théâtre pour élargir la vie des spectateurs. La scène devient, à la manière du laboratoire, le lieu privilégié pour poser les hypothèses et faire bouger les certitudes les plus établies. Interrogation sur la science, interrogation sur la place de l'homme dans le monde scientifique et raisonnable, interrogation sur la responsabilité du savant dans le devenir de l'humanité... mais surtout interrogation de Brecht sur lui-même et sur son rôle d'intellectuel dans un système où dire le vrai peut être, comme pour Galilée, une prise de risque fatale. Faut-il mentir pour protéger la vérité face à ses ennemis, dissimuler, se taire, se courber pour mieux se faire entendre quand les temps seront plus cléments ? C'est tout cela que met en jeu Jean-François Sivadier qui sait aussi que Brecht, en questionnant la science et ses rapports au monde, questionne le théâtre comme forme de représentation. Dans un décor d'estrades et de trappes, c'est un tourbillon burlesque et dramatique que nous offrent les acteurs, au rythme d'une pensée qui se développe en temps réel, une pensée qui se construit et parfois se détruit au rythme des hypothèses et des expériences, mais qui toujours s'adresse au spectateur qui est invité à partager ce mouvement réflexif. Et si Blaise Pascal, parlant de l'univers post-galiléen, affirme : “Le silence éternel de ces espaces infinis m'effraie” ne devrait-on pas répondre que proposé par Jean-François Sivadier, au plus près de Bertolt Brecht, il fascine et séduit encore plus qu'il n'effraie.
Distribution
mise en scène Jean-François Sivadier
Collaboration artistique : Nicolas Bouchaud, Véronique Timsit, Nadia Vonderheyden
Avec : Nicolas Bouchaud, Stephen Butel, Marie Cariès, Eric Guérin, Jean-François Sivadier, Christophe Ratandra, Christian Tirole, Nadia Vonderheyden, Dominique Brillault
Traduction : Eloi Recoing
Décor : Christian Tirole, Jean-François Sivadier
Accessoires : Christian Tirole, Dominique Brillault, Yann Chollet
Costumes : Virginie Gervaise
Lumières : Philippe Berthomé
Son : Stéphane Rio
Assistante à la mise en scène : Véronique Timsit
Production
Production déléguée : Théâtre National de Bretagne - Rennes coproduction Le Maillon - Théâtre de Strasbourg, La Halle aux Grains, Scène Nationale - Blois, La Rose des Vents, Villeneuve d'Ascq, Italienne avec Orchestre
Avec le soutien de : la DRAC Ile-de-France et de l'Adami
Texte français publié : par l'Arche éditeur