Proposer un “ici et maintenant” qui perturbe et bouscule, qui vit par et avec le danger, c'est à quoi se destine Marina Abramovic, l'une des pionnières du “body art” (art corporel), dont les performances repoussant les frontières physiques et mentales ont fait la renommée internationale. En prenant son propre corps pour objet de son art, elle crée des rituels particuliers, actions souvent extraites du quotidien où l'effort, comme la douleur, concourent à ce moment unique de vérité d'où se dégage une émotion intense partagée avec le public. Ce qu'elle appelle la fonction libératrice et purificatrice de la performance. À la pointe de l'avant-garde dans les années soixante-dix, d'abord avec son compagnon Ulay, puis suivant un parcours autonome, Marina Abramovic, fille de partisans yougoslaves, née à Belgrade en 1946, a réalisé une œuvre marquante dans l'art contemporain. De 1962 à aujourd'hui, elle a créé de nombreuses performances en solo, pièces de groupes, installations, sculptures, photographies, vidéos. À partir des années quatre-vingt-dix, l'artiste élabore sa propre biographie pour inscrire son œuvre dans un autre temps et en présenter les différents aspects. Démarche qu'elle entreprend en solitaire avant d'en confier une première version au vidéaste Charles Atlas, et une seconde – où pour la première fois, elle n'est que l'interprète de son œuvre – à l'un de ses compagnons de route, Michael Laub, metteur en scène. Depuis plusieurs années, elle enseigne l'art de la performance et a entrepris une réflexion autour de la transmission des œuvres des “body artists”.
Video portrait gallery nous donne à voir quatorze vidéos réalisées entre 1975 et 1998. Freeing the voice, 1975, montre Marina Abramovic allongée sur le sol, la tête en arrière, criant, jusqu'à perdre sa voix. Art must be beautiful, Artist must be beautiful, 1975, présente d'une manière plus exemplaire encore la performance de l'artiste, se démêlant les cheveux jusqu'à la douleur et allant même jusqu'à se mettre en danger de mort dans une série intitulée Dragon Heads, 1989/1992. On retrouve cette même volonté de dépassement dans The Onion, 1996, où l'artiste mange un oignon en regardant le ciel et en se plaignant de sa vie. La deuxième installation Waterfall est inspirée par les prières de moines tibétains. Marina Abramovic passe beaucoup de temps avec la communauté tibétaine réfugiée en Inde. Après vingt ans de visite dans ces monastères, le directeur de la Maison du Tibet à Delhi a proposé à l'artiste d'être chorégraphe pour la danse et le chant du lama tibétain. Il lui a proposé de travailler avec eux pour un tour d'Europe. Marina Abramovic a donc enseigné à cent vingt moines comment utiliser les micros, comment monter, puis descendre de scène, se souvenir des positions de la lumière, comment changer de costumes... Entre les répétitions, les moines continuaient leurs routines quoti- diennes de prières et de méditations. Marina Abramovic a eu l'idée de les filmer lors de leurs prières, et ainsi est née Waterfall. Les sons émis par ces cent vingt moines en prière provoquent un son similaire à celui d'une chute d'eau. Dans l'espace, se trouvent des chaises longues. Le visiteur pourra s'asseoir et se laisser absorber par ce chant d'énorme énergie créé par les moines.
Distribution
Installations vidéo : de Marina Abramovic
Commissaire : Serge le Borgne
Production
Avec le soutien : du Ministère de la Culture et de la communication, Fonds National d'Art Contemporain, et des galeries Cent8-Serge le Borgne, Paris et Sean Kelly, New York
Remerciements : au Conseil général de Vaucluse