Le Vivier des noms est d'abord le titre d'un carnet de Valère Novarina, entrouvert par L'Enfant Animal à la fin du Vrai Sang qu'il a mis en scène en 2011. S'y sont accumulés ce que l'auteur appelle logaèdres,logolithes, logogrammes et anthropoglyphes, une multitude de noms de personnages qui prolifèrent parfois d'eux-mêmes et qui jouent dans l'espace et dans le corps du spectateur. Une logique circulaire et réminiscente, comme au cirque, dans un ordre vivant parce qu'inachevé. Cette forêt de noms est la seconde qu'explore Valère Novarina. En 1986, sa première mise en scène, Le Drame de la vie, laissait déjà libre cours au déploiement de 2 587 noms, dans une entrée perpétuelle. Aujourd'hui, en cinquante-deux scènes, ces « esprits-verbaux », ces mille objets seront émis, énoncés, projetés, hasardés, risqués dans l'air par onze cents personnages appelés par leur nom – mais qui ne se montreront pas tous. Valère Novarina place, au milieu de ces noms, l'Historienne qui ordonne que l'histoire commence : le chien Uzedent sait qu'il n'apparaîtra plus, les Antipersonnes préparent un mauvais coup, l'Acteur fuyant autrui démontre pour la énième fois le contraire de sa pensée, le Ministre de l'extérieur proclame le latin langue vivante, les Enfants pariétaux viennent tous les quarts d'heure vider un sac d'idées toutes faites... En deux heures onze, la scène se défait, se refait, s'emplit de rébus. Le temps respire : personne ne l'avait vu. Les acteurs cheminent sur le tranchant du langage, entre mots qui libèrent et mots qui asservissent.
"Le Vivier des noms", extraits
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