Observer la marche. Encore et toujours. Comme un inépuisable point de départ vers des mondes inconnus. Regarder comment, à elle seule, une marche porte un corps. Explorer son caractère. Déformer sa course, la ralentir ou au contraire l'accélérer. Complexifier sa trajectoire. Et recommencer à marcher. Ensemble cette fois, en cherchant, même claudicant, un possible unisson. Observer cet unisson, décrocher de son orbite, plonger dans les abysses. Complexifier à nouveau sa trajectoire en la déviant d'un regard. Et maintenant cadrer en plan serré ces regards qui se croisent dans une forêt de hauteurs et de marches, dans des remous de vagues et d'ensembles, dans les jeux complexes du perpétuel mouvement de la vie. Ce monde inconnu... Avec son incroyable compagnie, Marie Chouinard multiplie les états de grâce dans une oeuvre à la fois sauvage et raffinée, primitive et sophistiquée. Ses matériaux ? Un corps « sismographe » captant « le jeu des fluctuations qui l'environne » et cette lumière qu'elle travaille dans une incandescence sonore. Comme ici, dans cette épopée abstraite, tour à tour tragique et comique, païenne et sacrée, qui célèbre d'un geste vif et précis une humanité partie en quête de ses confins.
Marie Chouinard pour "Soft virtuosity, still humid, on the edge"
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