"Au-delĂ ", extraits

La danse nous relie avec les absents. Fort de cette conviction, DeLaVallet Bidiefono traite les corps et les voix comme des canaux vers un au-delĂ . Voix graves et corps vibrants pour convoquer les morts si nombreux en RĂ©publique du Congo, pour tenter de partager ce rapport forcĂ©ment singulier aux catastrophes et aux disparitions. Ă€ Brazzaville, oĂą il vit depuis plus de dix ans, la mort est omniprĂ©sente. Après des annĂ©es de guerre civile au souvenir brĂ»lant, elle surgit encore brutalement, Ă  l'occasion d'accidents causant des centaines de victimes, ou plus silencieusement, consĂ©quence de la pauvretĂ©, de la malnutrition, de l'absence d'un système de santĂ© efficient. Dans sa nouvelle crĂ©ation, DeLaVallet Bidiefono a souhaitĂ© mettre en scène ce compagnonnage funeste, figurer cette empreinte sur le quotidien de ses concitoyens. Un quotidien rythmĂ© par les veillĂ©es funèbres qui durent six jours, pendant lesquelles le chagrin se manifeste par le rire et par les larmes. Six jours durant lesquels on entre en transe pour que s'expriment les dĂ©funts. La mort est tragique, bien entendu, mais elle offre aussi Ă  l'artiste un ennemi Ă  dĂ©fier. Engageant son corps dans la bataille, le chorĂ©graphe nargue la fatalitĂ© et se mue en combattant pour promouvoir l'action plutĂ´t que les mots et faire avancer la sociĂ©tĂ© congolaise. Pour Au-delĂ , ils seront neuf guerriers rĂ©unis au CloĂ®tre des CĂ©lestins : six danseurs, un chanteur et deux musiciens. Ils seront les passeurs d'une Ă©nergie violente, grave et pleine d'espoir. Chacun la dĂ©ploiera avec les armes qui lui sont propres : l'intensitĂ© physique et la prĂ©cision du geste pour DeLaVallet Bidiefono et les jeunes interprètes qu'il a pour la plupart formĂ©s Ă  Brazzaville, la puissance d'Ă©vocation de la basse et des percussions pour les musiciens qui partageront avec eux le plateau, ou tout simplement la voix. Personnage fantomatique au timbre caverneux, Athaya Mokonzi dira en effet le texte lyrique et furieux que DieudonnĂ© Niangouna a Ă©crit pour cette pièce. Ensemble, ils honoreront les morts et signeront un vibrant manifeste Ă  l'attention des vivants, revendiquant leur libertĂ© de crĂ©er et d'impulser de nouveaux Ă©lans.